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Pêche au Costa Rica

La pêche au Costa Rica se pratique principalement en côtier, pour pêcher une grande variété de poissons dont les fameux poissons coqs, carangues, petits thons, carpes rouges, mais aussi en pêche hauturière pour en découdre avec les dorades coryphènes, les espadons voiliers ou bien les majestueux marlins, roi des poissons de pêche sportive. Cliquez sur la pêche que vous souhaitez découvrir.


La pêche côtière au costa rica

La pêche côtière est celle qui compte le plus d’adeptes parmi les pêcheurs-voyageurs. C’est la pêche sportive par excellence recherchée par les amateurs de sensations fortes. Prospection, adaptabilité, réactivité, combativité… autant de termes qui prendront tout leur sens lorsque vous serez confrontés à l’attaque soudaine et spectaculaire de votre popper, au blocage brutal de votre jig ou à l’affolement de votre vif annonciateur d’une touche imminente. Attention, l’adrénaline va couler à flot !

Une grande diversité de techniques

En pêche côtière, il y en a vraiment pour tous les goûts. Et s’il existe des “mono-maniaques” du popper ou du jig, c’est bien la maîtrise de l’ensemble des techniques qui constitue la meilleure garantie de succès. On peut prendre plaisir à “ratisser” vainement pendant des heures la surface au popper : lorsque rien ne monte, je préfère pour ma part changer de technique pour rechercher les poissons plus en profondeur. Savoir s’adapter aux poissons, à leur humeur, aux postes pêchés et aux conditions, permet de développer son “sens de l’eau” et de progresser au fur et à mesure des voyages.

Le lancer au popper : la pêche aux leurres de surface est sans conteste la plus excitante par son côté visuel, avec la mouche (qui ne sera pas développée dans cet article tant elle constitue une technique spécifique). La charge brutale d’une carangue derrière un popper, la crête d’un coq qui suit le nez collé au leurre, l’explosion d’une carpe rouge venue des profondeurs, l’éclair d’une coryphène sortie comme une flèche de son abri… autant d’images qui restent à jamais gravées dans la vie d’un pêcheur et dont l’émotion rejaillit rien qu’en fermant les yeux…

Même en “exo”, il ne faut surtout pas croire qu’il suffit de se positionner n’importe où et de lancer pour prendre du poisson ! La pêche la plus excitante est celle des chasses. Elle demande une attention de tous les instants pour repérer les signes d’activité, comme les rassemblements d’oiseaux ou des bancs de poisson fourrage. Certains marins jouissent d’une vue extraordinaire et sont capables de repérer une chasse alors qu’il nous faudra plusieurs minutes d’approche pour simplement la deviner… Et, une fois sur la chasse, c’est généralement bingo sur le premier popper qui la traverse. Ce ne sont pas toujours les plus gros poissons touchés ainsi, et quelques lancers autour des chasses peuvent réserver bien des surprises. On privilégiera les poppers longs et effilés à ramener “à fond la caisse” en allant jusqu’à les faire ricocher en surface pour imiter la fuite du poisson fourrage.

L’autre approche consiste à pratiquer les spots connus du skipper, qui vont des patates de corail où la pêche s’effectue à vue dans quelques mètres d’eau, à des têtes de roche par 30 mètres, voire plus. Sa connaissance des lieux est alors primordiale : il faut être là au bon endroit et au bon moment. Et pour faire monter les poissons de grande profondeur, il ne faut pas lésiner sur la taille du popper et sur l’énergie dépensée : ça doit faire du bruit, des bulles et des gerbes d’eau ! Et si nous sommes plusieurs à le faire en même temps, c’est encore mieux. C’est le domaine des poppers trapus à grande bouche à ramener par de puissantes tirées entrecoupées de pauses (méthode du “stop and go”).

Le lancer de stickbaits : malgré toute l’application mise à animer un popper sur des chasses ou des spots prometteurs, ce leurre peut laisser les poissons indifférents, ou simplement provoquer des suivis sans attaque. C’est souvent le cas sur les spots fré­quemment pêchés ainsi où les poissons sont éduqués. Il est temps de passer au lancer de stickbaits qui vont pêcher juste sous la surface, ou un peu plus profond, pour décider nos partenaires de jeu : il s’agira donc essentiellement de stickbaits coulants. Au lancer, on laisse le leurre couler plus ou moins profondément, puis on le ramène assez rapidement en lui imprimant quel­ques secousses, canne basse de préférence. Le stickbait doit proposer une nage chaloupée erratique, comme un poisson blessé. Comme il remonte progressivement vers la surface, l’observation de sa nage permet d’optimiser son animation… et parfois de suivre l’attaque en direct. Même si l’aspect visuel de cette pêche est abandonné, le stickbait constitue un complément indispensable au popper : d’une part, il permet de décider des poissons qui ne montent pas en surface et, d’autre part, de se reposer, car son utilisation est beaucoup moins physique. Lors­qu’on est à plusieurs sur un bateau, il est recommandé d’avoir toujours un stick en action, sous les poppers…

Le jigging : on pêche une chasse et on ne prend que des petits poissons alors que l’échosondeur trahit la présence de spécimens plus gros. Ou on souhaite pratiquer plus profondément sur des spots de 30 à 200 mètres au relief accidenté. C’est alors au jig d’entrer en action. Le poids est à choisir en fonction de la profondeur et de la vitesse de la dérive. Un contrôle de la descente du jig le fil entre les doigts permet, d’une part, de détecter d’éventuelles touches, d’autre part d’accélérer sa descente en évitant qu’il ne parte en papillonnant. On doit sentir le contact avec le fond et ne pas trop s’écarter de la verticale lors de l’animation : si ce n’est pas le cas, il faut passer à un grammage supérieur.

L’animation consiste à remonter le jig sur toute la colonne d’eau par des secousses plus ou moins amples et rapides, tout en récupérant le fil lors des pauses entre deux tirées de manière à conserver en permanence le contact durant les “rebonds” du jig. Cela nécessite une bonne synchronisation des mouvements, surtout pour le jigging rapide à ultra-rapide nécessaire pour séduire des poissons comme les sérioles ou les thons à dents de chien. La touche se traduit par un blocage brutal du jig auquel il faut répondre par des ferrages aussi appuyés qu’il est profond (sachant que la profondeur est plus ou moins facile à estimer avec l’utilisation de tresses changeant de couleur tous les 10 mètres). Chaque touche s’accompagne d’une montée d’adrénaline : si le spectacle visuel de l’explosion en surface a évidemment disparu, on ne sait pas immédiatement ce qui est tout en bas au bout de la ligne. Faut-il s’attendre à un petit poisson qu’on remontera sans peine, ou à un de ces monstres qui vous videra la bobine en quelques rushs ? La précision sur la taille du poisson ne prend que quelques secondes, mais de quelle espèce va-t-il s’agir ? En effet, bien des prédateurs peuvent s’intéresser à un jig, beaucoup plus qu’à un leurre de surface d’ailleurs. Dans l’océan Indien par exemple, nous avions touché ainsi plus d’une trentaine d’espèces lors d’un même séjour, c’est dire !

Mais, à certains moments, les poissons semblent se désinté­resser du jig alors que l’écran du sondeur est saturé au point d’en perdre le fond : rien, nada, que d’chi… C’est à n’y rien comprendre ! Néanmoins, il reste toujours une solution pour prendre du poisson dans ces conditions…

La pêche au vif, à l’appât et en dandine : si aucun leurre ne fonctionne, ou que l’on est épuisé par ces pêches très physiques, un vif ou un tronçon de poisson finit toujours par “sauver” la journée, ou permet de toucher d’autres espèces, et même parfois de prendre LE poisson du séjour. C’est aussi la seule technique efficace dans les eaux chargées, comme celles de la Guyane, qui autorise la prise régulière de tarpons, carpes rouges et autres mérous en taille XXXL. Cette technique, qui se pratique aussi bien en dérive qu’à la calée, est pourtant boudée par de nombreux pêcheurs-voyageurs qui ne la jugent pas assez “sportive”. Si cette pêche est simple dans son principe – descendre l’appât ou le vif à proximité du fond ou à mi-profondeur sur une ligne plombée –, elle n’en reste pas moins passionnante. Pour la pêche au vif, il faut garder la canne en main et le fil pincé entre les doigts pour ressentir l’activité du vif. Celui-ci va s’agiter subitement à l’approche du prédateur et l’attaque va littéralement résonner jusque dans votre main. Les “bons” réflexes doivent alors s’enchaîner de manière méthodique : libérez le fil quelques secondes avant de refermer le pick-up et ferrez, si vous pêchez avec un hameçon “normal”, ou, resserrez simplement le frein en levant la canne pour tendre la ligne s’il s’agit d’un hameçon “circle”. L’usage de ce type d’hameçon est d’ailleurs à recommander, car il se pique généralement à la commissure des lèvres, ce qui permet de relâcher la prise sans dommage. Pour la pêche à l’appât, et chaque fois que cela est possible, il faut privilégier une pratique active associant un leurre, madaï-jig ou inchiku, et un appât fixé directement sur l’hameçon du leurre. Ainsi, le leurre jouera à la fois le rôle de lest et de teaser, ce qui est redoutable d’efficacité et provoquera des touches allant du simple “titillement” au démarrage brutal. Montures à poisson mort manié et fireball peuvent aussi être utilisés, tout comme le vif remplacé par un leurre souple. Cependant, dans de nombreuses destinations, le moindre poissonnet de 100 grammes est capable de déchiqueter un leurre souple en un coup de dent, ce qui oblige à en amener une valise entière…

La petite traîne : on peut rechercher les chasses ou se déplacer entre deux spots à vive allure. Néanmoins, à vitesse réduite (1,5 à 3 nœuds), c’est aussi l’occasion de mettre en traîne un poisson nageur de 15 à 20 cm : cela permet de se reposer entre deux scéances de popping ou de jigging, et peut se révèler très efficace sur certaines espèces comme le barracuda ou le thazard. Contrairement à l’ensemble des autres techniques, l’utilisation d’un bas de ligne acier ne nuit pas à l’efficacité de la pêche et reste même recommandée pour résister à ces “boîtes à dents”. On peut battre beaucoup de terrain et trouver des poissons là où on ne s’y attendait pas : c’est ainsi que j’ai pris mon premier thon à dents de chien à Madagascar, suivi de quelques autres en revenant jigger sur le poste précédemment enregistré sur le GPS du skipper.

Les espèces visées  et leurs comportements

Il serait fastidieux et vain de vouloir dresser la liste de toutes les espèces permettant la pêche sportive côtière dans le monde ! Néanmoins, certaines “familles” constituent nos partenaires de jeu favoris, car elles sont très combatives et réactives à de nombreuses techniques de pêche. En tout premier lieu viennent les carangues, poissons de pêche sportive par excellence, présentes dans toutes les mers tropicales. Il en existe plusieurs dizaines d’espèces, mais trois sont principalement re­cher­chées en pêche sportive : en Atlantique, la carangue hippo ; dans l’Indo-­pacifique, la carangue ignobilis (GT de son petit nom, pour “giant trevally”) et la plus modeste, mais magnifique, la carangue bleue. La prise d’un trophée est le rêve de tout pêcheur : 10 kilos pour la bleue, 20 kilos pour l’hippo et 50 kilos pour la GT. Sauf pour les plus gros spécimens, ce sont des poissons grégaires que l’on trouve partout lorqu’elles déclenchent de spectaculaires chasses de surface… ou nulle part, lorsqu’elles restent tapies en profondeur. Toutes sont de redoutables com­battantes, recherchées en priorité au popper tant leur attaque en surface est spectaculaire.

Plus fusiformes que les carangues, les sérioles offrent une défense tout aussi acharnée et la prise d’un spécimen de plus de 20 kilos reste inoubliable. Moins mobiles que les carangues, elles sont souvent fidèles à quelques têtes de roches. C’est un des poissons les plus réceptifs à un jigging  frénétique, même si une prise occasionnelle en surface reste possible.

Les carpes rouges sont de véritables fauves des mers dont la mâchoire rappelle celle des grands félins. Il en existe de multiples espèces dont certaines peuvent dépasser 50 kilos ; mais elles ne sont que rarement prises à la ligne car elles n’ont qu’une idée une fois piquées : regagner tout en puissance les fonds rocheux que constituent leurs repères. Selon les espèces, des spécimens de 10 à 20 kilos constituent déjà de très belles prises.

Les mérous sont également des adversaires de choix sur les fonds rocheux. Si certaines espèces restents “naines”, d’autres comme le goliath atteignent des tailles record de 400 kilos ! En zones coralliennes, la diversité et la splendeur de leur robe leur vaut l’appellation de truite de corail. Poissons de fond à l’allure “pataude”, ce sont de redoutables prédateurs pouvant monter en surface attaquer un popper. Puissants comme les carpes rouges, ils cherchent à regagner en force leur trou dès qu’ils sont piqués, mais sans en avoir la même vitesse. Poissons sédentaires souvent pris dans des profondeurs impor­tantes et sensibles à la décompression, leur densité est un révélateur de la pression de pêche locale.

On peut regrouper sous l’appellation de “boîtes à dents”

Poissons grégaires à l’attaque rapide comme l’éclair, leur premier rush, parfois ponctué de sauts, peut faire monter la bobine de moulinet dans les tours. Mais ils sont peu endurants, sauf lorsqu’ils dépassent les 20 kilos. Dotés de dents tranchantes, ils n’ont pas leur pareil pour couper net un bas de ligne et il ne vous reste plus qu’à les maudire quand vous vous faites voler les jigs à répétition sans même sentir les attaques !

Les requins sont rarement pêchés spécifiquement, mais certains comme les requins de récif sont de terribles combattants. La pêche au vif ou à l’appât sur bas de ligne acier est la technique la plus efficace, mais les attaques au popper ou au jig ne sont pas rares… et se finissent souvent par un bas de ligne sectionné. Au jig, on cherche plutôt à les éviter, car ce sont les spécialistes de l’effet “kiss-cool” : ils se saisissent de la prise lors de sa remontée, engagent un rush violent sans même se piquer et ne laissent au pêcheur qu’une proie amputée. Mais la prise d’un grand requin (50 kilos et plus) reste un moment d’émotion lors d’un séjour de pêche.

Certains poissons justifient à eux seuls un voyage de pêche. C’est le cas du tarpon, cette “sardine” géante de l’Atlantique qui peut dépasser la centaine de kilos et vous gratifier d’un véritable ballet aérien dès qu’il est piqué. On le pêche principalement à l’appât dans les estuaires ou à l’embouchure des lagunes, mais un leurre ne le laisse pas indifférent dans les eaux claires. Le thon à dents de chien, qui hante les tombants de l’Indo-pacifique, constitue le poisson trophée recherché par de nombreux adeptes du jigging. C’est un combattant aux rushs interminables qui peut atteindre une centaine de kilos. Quant au poisson coq, emblématique et endémique de la côte Pacifique de l’Amérique centrale, il constitue un véritable joyau de la mer.

D’autres espèces plus rares ne peuvent justifier d’une pêche  spécifique, mais représentent la “cerise sur le gâteau” lors­qu’on a la chance de les tenir au bout de la ligne : napoléon, cobia, … 

Enfin, il existe bien d’autres espèces qui sont en quelque sorte des prises “collatérales”, mais toujours appréciées : vivaneaux, capitaines, jobfish, … À l’image des naturalistes, “cocher” une nouvelle espèce demeure d’ailleurs l’objectif de certains pêcheurs. À ce petit jeu, l’océan Indien offre une diversité exceptionnelle. Le vif et l’appât y sont les pêches reines, suivies de très près par le jig.

“Notre” pêche côtière à Golfito au Costa-Rica

Nous avons consacré 4 journées à la pêche côtière lors de notre séjour au Costa-Rica, avec comme objectif la recherche du poisson coq, dont Golfito est un des “hots spots”. Les semaines précédentes ont été particuliè­rement fastes, avec de nombreuses prises de taille XL (15 kilos et plus).

Faire provision de vifs : si le poisson coq peut être pêché au popper, voire au jig, c’est au vif que les chances de succès sont les plus importantes. Il faut donc en faire provision chaque matin au départ. Au lever du jour, les immenses bancs de “sardines” font frissonner la surface de la mer qui est toujours d’huile. Il suffit de dandiner une mitraillette armée d’hameçons nus en fer blanc pour faire de magnifiques guirlandes virevoltantes. Mais les bancs sont très mobiles et il faut les suivre en permanence. Tous les bateaux qui vont partir en pêche sont bord à bord dans une ambiance de fête. Nous nous sommes amusés comme des enfants à ce petit jeu de celui qui en prendrait le plus. Les bancs se font de plus en discrets lorsque le soleil monte : pas question donc de louper le lever du jour si on souhaite remplir le vivier !

Même si l’ambiance est plutôt décontractée pour cette pêche, les cannes à popper doivent toujours être prêtes au cas où les carnassiers se mettraient en chasse. Cela nous est arrivé lors d’un séjour précédent : les sardines étaient systématiquement attaquées et la mer s’est transformée en un véritable lave-linge ! À peine tombé à l’eau, le popper était immédiatement englouti par un coq ou une carangue qui se le disputaient ! Pas question de rater de telles occasions lorsqu’elles se présentent…

Pour finir de remplir le vivier, il est bon de posséder quelques vifs plus gros et plus remuants. Irving le capitaine nous arrête sur des bancs de poissons repérés au radar et nous tombons sur une frénésie de “blue-runners”, qui ressemblent à nos chinchards, et quel­ques “palomettes”, véritable aimant à poissons d’après notre équipage. Les touches cessent brutalement, mais Flo est attelé à un gros poisson qui a saisi son casting jig en bout de mitraillette. Avec une ligne en 8 lbs, le combat est long et indécis… Avec fermeté et beaucoup de doigté, il nous fait monter une magnifique carangue royale qui accusera 8 kilos au peson, taille plus que respectable pour ce poisson peu fréquemment pêché. Ce sera un des rares poissons conservés du séjour ; préparé par Jerry en “cevice” (sorte de marinade locale), il nous régalera le lendemain au retour de pêche.

Le vivier est maintenant rempli d’une centaine de vifs et Irving sonne le “début” de la pêche. S’il reste des vifs en fin de journée, ils seront jetés à l’eau sur un bon spot pour simuler une chasse : j’avais ainsi pris une grosse carpe rouge lors d’un séjour précédent.

Direction la côte et les plateaux rocheux : l’ouverture du Golfo Dulce sur le Pacifique est bordée au sud comme au nord par une côte rocheuse. Elle se prolonge jusqu’à une profondeur de 30 mètres par un plateau au relief tourmenté qui représente un formidable repère à poissons : si ce n’était la chaleur, un breton n’y serait pas dépaysé ! Nous visitons de nombreux postes que nous pêchons en dérive, au vif comme au popper. Flo s’est aussi essayé au leurre souple, mais a fini par renoncer après s’être fait dépouiller en quelques secondes lors de chaque descente : la prise d’un baliste à la robe colorée a permis de désigner les responsables. La visite d’une tête de roche par 50 mètres aura aussi été l’occasion de dégainer les jigs pour prendre un pargo soyeux.

À chaque sortie, nous nous sommes attardés sur deux spots particulièrement prometteurs. Au sud, des têtes de roche où une activité volcanique laisse échapper en permanence des chapelets de bulles. Et au nord, le fameux rocher de Matapolo et ses plateaux rocheux, sentinelle d’entrée dans le Golfo Dulce. Comme toujours, le golfe est protégé des vents par la cordillère Salamanca. Mais, phénomène exceptionnel, une grande houle venant du large a perturbé nos deux premières journées de pêche en coupant net l’activité alimentaire des poissons. Seuls les “pargos”aux robes somptueuses et variées se sont intéressés à nos vifs : pargo amarillo, colorado, manchado ou roquero… Toutes ces carpes rouges ont en commun leur férocité et leur obstination à retourner en force à leur trou dès qu’elles sont piquées : rien n’est jamais gagné lorsqu’on pêche en 30 ou 50 lbs, même sur un poisson de quelques kilos. Éric et Yannick ont eu l’occasion de se mesurer aux grands cuberas au pied de Matapalo, avec la même sanction immédiate : départ irrésis­tible et casse imparable dans les rochers. Devant cette faible activité en profondeur, nous avons demandé à notre plongeur Nico d’y aller voir ; son verdict fut sans appel : vous pêchez sur un “mur” de poissons, notamment de carangues… Et c’est finalement au popper “home-made” que Flo réussit à sauver la mise lors de ces deux premières journées avec des coqs de 10 à 20 kilos. Leur réputation n’a vraiment rien d’usurpé. L’excitation est à son comble lorsqu’on aperçoit ces crêtes surgir et zigzaguer derrière le popper… Mais il ne faut surtout pas perdre ses moyens et continuer à popper car l’attaque finale n’est jamais garantie. C’est ce qu’a parfaitement réalisé Flo pour le plus gros coq du séjour, qui n’était que le plus petit de la meute qui se disputait son popper… Le combat est complètement imprévisible avec des rushs dans tous les sens, des changements brutaux de directions, voire des sauts à l’approche du bateau. Le plaisir est décuplé du fait que cette espèce ne cherche pas à se réfugier dans les obstacles et qu’on peut ainsi la pêcher en ligne fine (20 à 50 lbs). Et quel magnifique poisson lorsqu’il est sorti de l’eau ! Mais il faut faire vite car il est fragile : photo et rapide remise à l’eau après réoxygénation sont de rigueur.

C’est donc essentiellement au popper que nous ferons la majorité des prises durant ces 2 journées “difficiles” : carangues “caninus” (petite sœur de l’hippo d’Atlan­tique), carangues bleues, carangues gros-yeux, thazards scierra, orphies crocodile… Preuve que les poissons peuvent réagir par simple agressivité quand ils ne sont pas en activité alimentaire.

Avec la houle qui s’est écrasée progressivement, nos deux autres sorties ont été beaucoup plus fructueuses avec une reprise de l’activité alimentaire des coqs et des carangues qui s’intéressaient enfin à nos vifs. Flo a même enrichi son “tableau” d’une sériole de 7 kilos. Comme nous avons longuement insisté sur ce plateau rocheux de Matapalo où rodent les grands cuberas, j’ai sorti “l’artillerie lourde” en 80 lbs pour tenter ma chance. Mais ce sont coqs et carangues qui se sont intéressés à mon Roosta popper 195, notamment deux grands coqs d’au moins 30 kilos qui ont suivi sans attaquer jusqu’au bateau, alors que mes amis multipliaient les prises de 8 à 15 kilos au vif. Si le coq a une petite gueule par rapport à sa taille, un grand coq peut tout de même s’attaquer à gros : nous avons pu en voir un géant poursuivre une bonite de 2 à 3 kilos. Malheu­reu­sement, c’était hors de portée de lancer et l’action n’a duré que quelques secondes car la bonite n’a pas fait long feu…

Le long des plages : la pêche de base est une traîne lente au vif au plus près de la plage et du shore break, ce qui requiert une très grande attention de la part du capitaine pour la sécurité de l’équipage. On peut aussi multiplier ses chances en pêchant en même temps au popper vers la plage, soit en piquant directement les poissons, soit en les attirant au bateau pour qu’ils s’attaquent aux vifs. On bat ainsi beaucoup de terrain. J’ai le souvenir, lors d’un voyage précédent, d’avoir croisé la route d’un immense banc de coqs qui nous a fait perdre le compte de nos prises et vider le vivier ! Les prises sont souvent plus petites que sur la roche (3 à 10 kilos), mais la rencontre avec un grand spécimen reste toujours possible.

On rencontre le long des plages un autre grand poisson de sport : le snook noir. Pouvant atteindre 25 kilos, il se concentre aux arrivées d’eau douce, même s’il ne s’agit que d’un mince filet d’eau. Sa pêche est très technique et demande la parfaite maîtrise d’un bateau en excellent état. Entre les séries de grandes vagues, on se rapproche en marche arrière au plus près de la plage pour lancer dans l’écume, voire sur le sable, une sardine sur un montage non plombé ; puis, on reprend un peu de large : pas facile de garder le contact avec le vif sans le tracter dans de telles conditions… Le snook est un poisson très tatillon et c’est avec un matériel à bar que l’on peut s’essayer. Malgré la houle qui rendait l’exercice particulièrement difficile, Éric a touché ainsi un magnifique poisson de 8 kilos après un combat spectaculaire ponctué de sauts au ras du shore break. Et il était temps que le poisson arrive au bateau, car le bas de ligne en 60/100e n’aurait pas résisté beaucoup plus longtemps à la mâchoire râpeuse du snook.

Au final, nous aurons réussi de belles pêches malgré des conditions difficiles. C’est à mettre à l’actif d’Irving et John, mais aussi à l’équipe de pêcheurs qui n’a jamais rien lâché… et aussi grâce à l’excellente ambiance qui a toujours régné sur le bateau ! ◆

Quelques conseils avant de partir


la pêche hauturière au costa rica

Grand classique des destinations de pêche exotique, la traîne hauturière a connu ses heures de gloire dans la première moitié du 20e siècle, magnifiée par des écrivains comme Ernest Hémingway ou Pierre Clostermann. Si elle a un peu perdu de son prestige dans les décennies qui ont suivi, elle connaît un net regain d’intérêt avec l’apparition de matériels de plus en plus légers et performants. C’est la technique de pêche par excellence pour capturer le “big fish” de ses rêves. Et même si la prise de ce fantastique trophée n’est pas au rendez-vous, cette pratique vous permettra de combattre toutes sortes d’espèces dans une immensité bleue qui vous réservera des surprises en tout genre et des spectacles inoubliables.!

 Une pêche contemplative…

Le départ pour une pêche hauturière est toujours chargé d’espoirs : direction le grand large vers les eaux bleues, avec souvent le spectacle grandiose du lever du soleil en mer. Passé le tombant, les lignes sont mises en traîne selon un savant agencement visant à éviter tout emmêlage, même en cas de brusque changement de cap. Le skipper ajuste méticuleusement la longueur de traîne de chacune des lignes pour que la nage des leurres soit optimale, sans trop plonger ni trop décoller de la surface. La longue traque des big fishs commence et le pêcheur peut s’adonner à la contemplation du grand bleu et de sa vie secrète dont nous ne percevons que la partie émergée. La côte ayant disparu et en absence de tout repère, le bateau devient une horloge pour se repérer où la proue marque midi et la poupe six heures.

Si l’océan peut paraître vide à certains moments, la vie est partout si on y prête attention. Au ras de l’eau ou très haut dans le ciel, les oiseaux marins sont, comme nous, en quête de leurs proies. Au fur et à mesure que le bateau prend le large, mouettes, goélands, fous de bassan, frégates et cormorans cèdent le ciel aux petits et grands planeurs comme les sternes, puffins, pétrels et autres albatros. Alors qu’ils semblaient avoir disparu, les voilà qui surgissent de toute part, tous dans la même direction… À trois heures, des jets de vapeur périodiques traduisent la présence de baleines, approchables à quelques dizaines de mètres. Une troupe de dauphins file vers le bateau pour jouer avec nous pendant quelques minutes : couché sur l’étrave, on pourrait presque les toucher… Des poissons volants giclent à la surface pour planer sur plusieurs dizaines de mètres autour du bateau. Quel est cet objet flottant qui fait le bouchon sur les vagues ? Une tortue marine qui sert de reposoir à un fou masqué. Puis, ce sera un arbre arraché d’un lointain rivage pour servir de perchoir aux goélands. Là-bas à huit heures, l’envol de raies manta attire notre attention. Un vol de papillons piègés par un coup de vent s’abat sur le pont pour y agoniser, alors que des libellules se reposent sur le scion des cannes. 

Bien loin de la monotonie, la contemplation de la vie marine fait partie intégrante de la journée de pêche. Et ces observations sont autant d’indices dans notre recherche : ces oiseaux qui se regroupent nous indiquent la direction à prendre pour trouver un banc de thons. Deux frégates qui tournoient ont repéré un marlin qui va bientôt entrer en chasse en leur abandonnant quelque menu fretin. Les dauphins se mettent en ordre le bataille pour chasser dans un banc de bonites, les thons jaunes vont certainement participer au festin. Et le moindre objet flottant peut abriter un banc de coryphènes ou, plus en profondeur, des wahoos. Plus au large, une frontière bien nette, ourlée de déchets marins, se forme à la surface entre une mer d’huile et le clapot. Deux courants se rencontrent et rassemblent en surface aussi bien des restes végétaux que de multiples résidus de l’activité humaine…

… Mais une pêche active…

Contrairement aux apparences, la traîne hauturière n’a rien de la recherche d’une aiguille dans une botte de foin. Il suffit de consulter les points GPS des prises qui sont généralement enregistrés par les skippers pour constater que leur répartition n’a rien d’aléatoire. L’observation de la vie marine et des courants sont autant d’indices guidant la traque du poisson. On peut certes se désintéresser de ce qui passe dans le bateau et sur l’océan pour somnoler, siroter ou “taper le carton”, en laissant ce “travail” à l’équipage. Mais c’est se priver d’une grande partie de l’intérêt de cette pêche. Et c’est aussi perdre beaucoup d’efficacité, car le moindre indice peut conditionner le résultat de la journée. Car, plus on est à observer l’activité marine, plus les chances de succès sont grandes, d’autant que la motivation du skipper s’en voit renforcée. J’ai connu des journées sauvées par des indices aperçus, parfois même devinés dans le lointain, et qui ont guidé notre route : l’extrémité d’un bois flottant qui abritait une colonie de coryphènes, une frégate isolée tournant dans le ciel en surveillant “son” marlin, une voile devinée entre les vagues qui était celle d’un voilier… Et il faut toujours garder un œil sur les leurres et rester sur le qui-vive. Changement de direction du vent, des courants, de l’aspect de surface de l’eau : il faut régulièrement réajuster les distances de traîne pour que la nage des leurres reste optimale. C’est le rôle du skipper et de son marin, mais il est instructif d’observer et de chercher à comprendre toutes ces manœuvres. Un leurre qui saute et s’emmêle, ou qui accroche un débris dérivant, autant d’incidents qu’il faut détecter immédiatement pour ne pas continuer à traîner pour rien.

Nous sommes bien installés dans cette quiétude et la montée d’un poisson dans le grand bleu est une intense et brutale décharge d’adrénaline. La touche peut surprendre et s’accompagner immédiatement du hurlement du moulinet. Mais, beaucoup plus souvent, le poisson suit et observe avant de passer à l’attaque… ou d’y renoncer. C’est un éclair entrevu derrière les leurres, un rostre qui perce à peine la surface de l’eau. La tension est alors palpable sur le bateau, il faut réagir très vite. Cela peut être le skipper qui modifie légèrement l’allure du bateau, le marin ou un pêcheur qui anime le leurre.

Mais c’est surtout l’occasion de mettre en œuvre la technique du “switch and bait”, particulièrement efficace sur l’espadon voilier. Le skipper ralentit légèrement et on laisse immédia­tement filer un appât au plus proche devant notre poisson. Le leurre qui l’intéressait est remonté progressivement, puis, rapidement, dès qu’il croise notre appât qui se retrouve seul dans le champ de vision du poisson excité. Si tout se passe bien, on le voit rostrer ou engamer l’appât en même temps que l’attaque est ressentie dans la tresse pincée entre les doigts. La ligne file quelques secondes, on referme le pick-up et on attend le contact en relevant la canne pour que l’hameçon circle, généralement utilisé pour cette technique, vienne se planter au coin de la gueule de notre poisson. Cette technique demande une grande maîtrise de ses “nerfs” et une parfaite coordination dans l’action. Elle est particulièrement excitante et d’une redoutable efficacité. Mieux vaut laisser faire les marins la première fois pour comprendre la manœuvre et pouvoir présenter l’appât soi-même sur les poissons suivants. Dans tous les cas, le pont arrière du bateau doit être dégagé de tout obstacle et l’ensemble des lignes remonté rapidement. L’action doit être rapide, bien organisée, ce qui nécessite d’avoir bien défini les rôles au préalable. Le combat peut alors s’engager en toute sérénité, pour quelques minutes… à plusieurs heures ! Pour la recherche des records dont l’IGFA (International Game Fish Association) assure l’homologation, le pêcheur doit assurer seul le combat jusqu’à la prise en main finale du bas de ligne. Mais cela nécessite une grande condition physique et une excellente tehnique sur des poissons qui peuvent atteindre plusieurs centaines de kilos. Pour la pêche plaisir, on pourra préférer partager le combat en se relayant à la canne, ce qui met cette pratique à la portée de tous. En abrégeant le combat, le poisson peut être relâché dans de meilleures conditions.

Les poissons de pêche hauturière

Les poissons à rostre sont recherchés en priorité : des géants, comme les marlins bleus ou noirs qui peuvent dépasser la barre magique des mille livres, aux plus modestes de cinquante à deux cent livres, comme le marlin blanc ou les espadons voiliers. Surgis de nulle part comme par magie, ils peuvent s’escrimer de longues minutes derrière les leurres et se parent de couleurs électriques au fur et à mesure que leur excitation monte. Ces “chevaliers de la haute mer” offrent de magnifiques combats aériens, comme s’ils couraient en appuyant leur queue sur l’eau.

L’espadon “xiphias gladius” au rostre applati en forme d’épée est le plus robuste au combat, mais beaucoup moins aérien que le voilier : très farouche, il plonge en profondeur à l’approche du bateau et justifie une pêche spécifique.

Les thons sont les autres grands poissons de pêche sportive en hauturier. Dotés d’une vue perçante, ils sont très sélectifs sur leur proies. Lorsqu’ils chassent en surface, mieux vaut arrêter la traîne pour les pêcher au lancer avec des leurres imitatifs : pas si facile quand il s’agit de gros spécimens se gavant dans des boules d’anchois de moins de dix centimètres ! On peut aussi les pêcher spécifiquement en profondeur au broumé. Puissance, rapidité et endurance sont les trois qualificatifs qui collent le mieux à ces véritables torpilles sous-marines. La lutte est bien plus physique qu’avec un marlin, mais moins spectaculaire car les thons luttent en profondeur sans jamais sauter.

Les dorades coryphènes sont les acrobates de la mer qui fusent en surface comme une flèche sur les leurres, et que l’on voit souvent accourir de loin en un éclair bleu électrique en provenance d’un bois flottant ou d’un DCP. Sauf pour les plus gros sujets (25 à 40 livres), elles vivent en banc et suivent leur “sœur” jusqu’au bateau. C’est alors l’occasion de les pêcher à vue, au vif, au poisson mort ou au leurre : tant qu’un poisson se débat et fait l’acrobate autour du bateau, les prises peuvent se succéder… jusqu’au premier décrochage. Les coryphènes livrent de magnifiques combats en ligne fine, qui ne peuvent malheureusement pas être appréciés à leur juste valeur sur du matériel lourd destiné aux marlins.

Taillé pour la vitesse, le wahoo est le plus rapide de tous, capable de pointe à près de 100 km/heure au démarrage. Mais c’est un sprinter peu endurant dont le combat vaut essentiellement pour son premier rush. Doté de dents particulièrement tranchantes, c’est un destructeur de leurres dont il faut se méfier lorsqu’il est hissé à bord.

Sauf les plus gros thons et les plus grands poissons à rostre, tous ces poissons qui font rêver sont à votre portée lors d’un voyage de pêche. Alors ne manquez pas l’occasion, au minimum pour le spectacle exceptionnel qu’ils peuvent offrir. Ils ont bien des points communs :

  • leur combativité, dès lors qu’ils sont pêchés avec un matériel adapté ;
  • la beauté de leurs couleurs lorsqu’ils sont dans l’eau ou immédiatement pêchés, mais qu’ils perdent rapidement en mourant. Rien n’est plus sinistre qu’un marlin ou un voilier mort, surtout pendu à un portique ;
  • la qualité de leur chair. Mais restons raisonnables dans nos prélèvements : tous les poissons à rostre méritent d’être relâchés, sauf s’ils sont trop blessés. Il est légitime de garder un thon, une coryphène ou un wahoo pour le carpaccio du soir, mais n’abusez jamais…

La pêche hauturière à Golfito

Le Costa Rica, tout particulièrement au large de Golfito, est une destination phare pour de nombreux poissons péla­giques, et attire les pêcheurs du monde entier, notamment les américains. L’espadon voilier pacifique est l’espèce emblématique des lieux, où il est à la fois abondant tout en atteignant des tailles exceptionelles : jamais moins de 30 kilos, 40 à 60 kilos en moyenne, avec des trophées d’une centaine de kilos. Les marlins sont également très présents : principalement les marlins noirs, mais également quelques bleus et, plus rarement, les rayés. Leur taille reste modeste, en moyenne de 75 à 200 kilos ; néanmoins, de véritables monstres (on les appelle les “granders” pour ceux qui dépassent les 1 000 livres) sont régulièrement piqués, mais rarement pris, car non pêchés spécifiquement. On peut ici rêver d’un “grand slam”, à savoir la capture, le même jour, d’un voilier et des trois espèces de marlin.

Les coryphénes nagent dans ces eaux toute l’année, en densité exceptionnelle à certaines époques (décembre-janvier). Le record mondial de l’espèce provient d’ailleurs du Costa Rica avec un poisson de 43 kilos. Les thons jaunes sont présents de manière sporadique en fonction de leurs migrations, avec des chasses à perte de vue un jour, mais pouvant disparaître dès le lendemain : il ne faut alors pas rater la bonne occasion quand elle se présente !

Nous avons consacré 4 journées à la traîne hauturière, principalement celle de l’espadon voilier. Le plan de traîne est original, visant aussi bien les marlins que les voiliers. Deux “daisy chains” sont mises en traîne de part et d’autre et au plus près du bateau : elles sont constituées d’imitations de calmars montées en chaîne ou en rateau. Non armées, elles visent à attirer les pélagiques dans le sillage du bateau. Immédiatement derrière, deux cannes en 50 lbs proposent en direct des leurres à jupe agrémentés d’un balaou. Un peu plus en arrière, deux autres simplement armées de balaous sont tangonnées au plus large. Enfin, une canne centrale en 80 lbs armée d’un gros leurre à jupe complète le plan de traîne au plus loin du bateau.

Nos journées de traîne nous permettront de constater l’immense richesse de ces eaux, avec des tortues omni-présentes, des hordes de plusieurs centaines de dauphins, une remarquable diversité d’oiseaux marins et, bien sûr, les espadons voiliers : un enchantement permanent où le temps passe bien vite… C’est le résultat d’une gestion exemplaire de la pêche puisque la pêche professionnelle y est strictement réglementée et même interdite dans la bande côtière des 30 milles. Du fait de son importance économique majeure, la pêche sportive est privilégiée et la pratique du “catch and release” généralisée pour les poissons à rostre comme pour les poissons coq en pêche côtière.

Nos trois premières journées viseront en priorité l’espadon voilier, en “swich and bait” sur du matériel spinning pour un plaisir maximum. Deux cannes en 30 lbs sont prêtes sur chaque bord à l’arrière du bateau : l’une est montée avec un balaou prêt à pêcher, l’autre est équipée d’un circle hook pour y accueillir un vif, car nous avons “fait notre marché” tous les matins en passant dans les bancs de sardines. Le montage des balaous par les marins est un vrai travail d’artiste et leur nage est parfaite. 

Dans l’action avec les voiliers…

Durant nos sorties, nous n’aurons que deux départs sur les cannes de traîne. À chaque fois, nous avons cru à un marlin, mais ce sont deux coryphènes d’une dizaine de kilos qui nous ont régalés de leurs sauts… et de leur chair en carpaccio le soir ! Mais plus d’une quarantaine de voiliers se sont intéressés à nos teasers, autant d’occasions de mettre en œuvre le “switch and bait”. Ayant déjà eu l’occasion de le pratiquer, j’ai insisté pour présenter moi-même le balaou alors que John remontait le teaser : bingo dès le premier poisson qu’on a parfaitement vu se saisir du balaou. Frein réglé assez doux, le combat d’un voilier sur ligne fine en spinning est un régal : les longs rushs sous la surface sont ponctués de sauts spectaculaires où le poisson semble rebondir sur l’eau. Mais, comme gêné par sa voile immense aux couleurs électriques, il se fatigue rapidement et un quart d’heure suffit généralement pour l’amener au bateau : attention alors à la casse ou au décrochage dans ces derniers instants, car le poisson va jeter ses dernières forces dans des sauts au ras du bateau dont on recevra les éclaboussures. Lorsque John, dont les bras portent encore quelques balafres, juge le poisson suffisamment fatigué, il le saisit par le rostre que le voilier agite violem­ment dans tous les sens comme le ferait un fleurettiste.

Même si nous devons rater des poissons, nous décidons, devant leur abondance, que chacun d’entre nous mettra en œuvre le swich and bait. Ce fut plus ou moins laborieux, mais nous aurons tous pu profiter de cette pêche d’exception, avec seize poissons au bateau. Éric aura connu le plus de difficultés à piquer son voilier, mais finira par prendre le plus beau poisson du séjour, avec un bon soixante kilos. Nous le soupçonnerons d’avoir “volontairement raté” cinq à six poissons plus petits pour ne pas passer son tour et attendre plus gros… 

… à la recherche du marlin

Dès lors que chacun de nous a pris notre voilier, la priorité est donnée à la recherche du marlin en accélérant la vitesse de traîne. Il règne une excellente ambiance entre les skippers des différentes organisations de pêche qui communiquent tout au long de la journée. À quelques milles de nous, un bateau nous appelle pour annoncer qu’il a trouvé un DCP (cf. encadré ci-dessus) dérivant “blindé” de poissons et qu’il a pris un marlin noir. Nous stoppons immédiatement la traîne pour rejoindre le point et arrivons quelques minutes plus tard alors que le bateau est en combat avec un second marlin, que nous voyons sauter au loin à plusieurs reprises. Comme il n’est pas question de mettre en pêche durant leur combat, nous approchons du radeau soutenant le DCP : la mer grouille de poissons là-dessous ! Les cannes sont montées rapidement et nous descendons nos jigs. Ils ne font que quelques mètres avant d’être stoppés net. Pendant près d’une heure, nous enchaînerons les prises sans interruption en pêchant, quasiment à vue, bonites, thons jaunes, coryphènes et même sérioles. Ce ne sont que de petits poissons de 3 kilos maximum, mais nous sommes pris d’une véritable hystérie collective devant cette frénésie… L’autre bateau ayant pris son deuxième marlin, nous pouvons nous remettre en traîne, avec comme principale offrande une grosse bonite à flapper. La tension est à son maximum, mais seuls des voiliers montent derrière nos lignes. Après une heure à tourner autour du DCP, il faut se rendre à l’évidence : il n’y a plus malheureusement de marlin à prendre.

Suivant son instinct, Irving décide de remonter la ligne de courant qui portait le DCP. Nous longeons de nombreux débris flottants et finissons par découvrir deux autres DCP en dérive. Mais le premier est très récent et n’a pas développé un écosystème suffisant pour attirer les prédateurs. Le second est beaucoup plus ancien, mais semble déserté par les poissons. Irving est formel : inutile d’insister, il a été pêché très récemment à la senne. Nous continuerons donc notre traîne, guidés par les courants et la vie marine. Au loin, nous apercevons une colonie de plusieurs centaines de dauphins en ordre de bataille dans une mer en effervescence. Au fur et à mesure que nous approchons, nous découvrons une immense chasse où se mêlent dauphins, thons jaunes et oiseaux marins de toutes espèces. Mais nous ferons le “mauvais” choix en continuant à traîner sans succès autour de la chasse qui aurait pu attirer les marlins.

Dernier jour de pêche hauturière : nous tenterons “un coup de poker”. À plus de 40 milles au large de Matapalo, un riche américain a posé des DCP fixes par 2 000 mètres de profondeur. Chaque récente visite de ces DCP a rapporté au moins un marlin. Mais dans de telles profondeurs, les courants marins peuvent l’entraîner sous plusieurs mètres d’eau et il devient alors très difficile de localiser le DCP. Nous prenons le large à vive allure sans même nous attarder pour pêcher les voiliers que nous voyons régulièrement sauter. À l’approche du point GPS, nos cœurs s’accélèrent lorsque nous commençons à apercevoir la bouée… Mais notre excitation tombe bien vite : le cordage qui soutient la bouée est neuf et vient d’être remplacé : il faudra attendre que la vie s’y installe… Le retour se fera en traîne où nous n’intéresserons même pas un voilier : ce sera la seule “déception” de notre séjour, mais c’est aussi ça la pêche ! Le groupe qui nous succèdera aura plus de chances et touchera plusieurs marlins en cherchant le voilier…

Alors si ces poissons du grand bleu vous font rêver, sachez que ce rêve est accessible et à la portée de tous. La traîne hauturière est une pêche passionnante dont il ne faut surtout pas se priver en venant à Golfito.

Les Dispositifs de Concentration de Poissons (DCP)

Tout objet flottant au large des côtes est rapidement colonisé par les organismes marins (coquillages, algues, …) qui créent un écosystème attirant le poisson fourrage et ses prédateurs pélagiques… Bien que connu depuis l’antiquité, ce phénomène naturel n’est réellement utilisé pour la pêche que depuis les années 1980, avec la pose “volontaire” de DCP. Ils sont constitués d’un mouillage relié à un système de repérage en surface (bouées et/ou radeau) par un cordage. Des feuilles de palmier et débris de filets sur la partie supérieure de ce cordage permettent d’en améliorer l’efficacité. Ce procédé a largement été développé aux Antilles, dans l’océan Indien (notamment à la Réunion) et en Asie. Il facilite la pêche artisanale (de 50 à 2 000 mètres de profondeur) tout en améliorant la productivité des océans, ce dernier point faisant l’objet de controverses. En effet, leur exploitation génère de nombreux conflits d’usage, mais il est possible, dans certains cas, aux pêcheurs sportifs d’y avoir accès. La pêche gagne ainsi en efficacité, mais y perd un peu de ses mystères lorsqu’elle se résume à faire “la tournée” des DCP. Sous les dispositifs de repérage en surface, on trouvera régulièrement les dorades coryphènes qu’on pourra ainsi pêcher au popper. Plus en profondeur, c’est au jig que thons et wahoos seront touchés. Et c’est dans un rayon pouvant atteindre un kilomètre que les poissons à rostres et les requins se trouveront, en pêchant à la traîne ou en dérive au vif.

Le principe est maintenant utilisé à une échelle industrielle pour pêcher les thons sur toutes les mers tropicales avec la pose de DCP flottants équipés de balises électroniques de repérage (type Argos) et de sonars pour estimer, en temps réel, l’abondance des poissons. Lorsque le DCP “a fait le plein”, il est pêché à la senne. La méthode est redoutablement efficace et assure aujourd’hui plus de la moitié de la production thonnière mondiale ! Mais elle est aussi destructrice sur les juvéniles, les poissons à rostres, les requins et bien d’autres espèces écologiquement sensibles, comme les tortues marines et les mammifères marins. Des ONG comme Greenpeace se mobilisent depuis quelques années contre ces pratiques destructrices pour la faune marine .

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